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Les heures planétaires
© Paul Gagnaire (1)


Figure 1
Planètes et jours de la semaine

Pythagore (Samos vers 580, Tarente vers 500 av. J.C) est à l’origine du principe qui perdura pendant 2000 ans : celui de la perfection du mouvement circulaire uniforme. Le modèle transmis par son École était le suivant :
La Terre sphérique, pesante, est au centre du monde, immobile.
La sphère des étoiles fixes exécute autour de la Terre une révolution d’orient en occident suivant un axe invariable. Le grand cercle du ciel perpendiculaire à cet axe est appelé équateur.
Le Soleil, la Lune et les 5 planètes, emportés par ce mouvement, décrivent chaque jour des cercles parallèles à l’équateur. Le Soleil accomplit en 365,… jours un mouvement propre d’occident en orient dans un plan incliné par rapport à l’équateur.
La Lune et les 5 autres planètes ont de même, sur des plans plus ou moins proches de celui du Soleil, un mouvement d’occident en orient sur des orbites d’autant plus lointaines que leur période est plus grande.
Mercure et Vénus, suivent ou précèdent le Soleil, avec un faible écart angulaire (au plus 29° pour Mercure, 49° pour Vénus). L’égalité des périodes moyennes de Mercure, de Vénus et du Soleil fit hésiter sur l’ordre des orbites, mais finalement le Soleil fut placé au milieu avec trois planètes au-dessous (Lune, Mercure, Vénus), trois au-dessus (Mars, Jupiter, Saturne) comme l’indique la Figure 1.
Les astronomes de cette époque comprenaient dans les planètes le Soleil et la Lune. Ils ne connaissaient pas les planètes au-delà de Saturne : Uranus et Neptune.


L’origine de la semaine de 7 jours est probablement astronomique et liée à la Lune : 7 jours représentent en effet un quart de lunaison environ. Les noms des jours sont, eux, liés aux planètes dans la plupart des langues indoeuropéennes.

Pour les astrologues, anciens et modernes, chaque heure de la journée est sous l'influence d'une des sept planètes traditionnelles : Saturne, Jupiter, Mars, Soleil, Vénus, Mercure et Lune. Cette succession a engendré l'ordre des noms des jours de la semaine.

Saturne
Jupiter
Mars
Soleil
Vénus
Mercure
Lune
Symboles astrologiques des planètes

Astronomie & Astrologie

Figure 2

Tableau des Régents de l'heure

Chaque planète, ou plus exactement la divinité qui lui est associée, régnait à tour de rôle sur une heure du jour, dans un cycle continu, en commençant par les planètes les plus lentes, soit de Saturne vers la Lune
Chaque heure de la journée est ainsi "gouvernée" par une planète. La planète régente de la première heure d'un jour est celle qui a donné "naissance" à ce jour. Ainsi le Soleil préside la première heure du dimanche, la Lune la première heure du lundi, etc ...
Les heures suivantes sont régies par les planètes suivant l'ordre décroissant des distances avec la Terre : Soleil, Vénus, Mercure, Lune, Saturne, Jupiter, Mars.
Il existe ainsi des tableaux des Maîtres de l'heure, nommés aussi Régents de l'heure ou Seigneurs de l'heure, tels que celui-ci :


La Trinité des Monts : Tableau des planètes régentes

in Barozzi Francesco, Cosmographia, Venetia, 1598 (4a)

Exemples de cadrans présentant les symboles des "planètes régentes"

En gnomonique on connaît des cadrans solaires où les cases formées par les croisements des lignes horaires et des arcs de déclinaison contiennent , pour autant qu'il existe assez de cases compatibles avec la déclinaison du cadran ; l'idéal est que le cadran porte au moins treize lignes horaires.
Pour qu'un tel système donne sa pleine mesure, il faut aussi consentir à poser que les jours de la semaine seront représentés par les sept arcs de déclinaison usuels, aux 21 mensuels, et non par l'espace entre deux arcs. En effet, les sept arcs ne composent que six espaces et les symboles de la première ou de la dernière journée de la semaine ne pourront pas être dessinés autrement qu'en dehors des cases.

San Benigno Canavese (IT) : 11-13, via Re Umberto 1er
Görlitz (DE) : sur une pharmacie de l’Untermarket
Gaming (AT) : Kartause, Bibliothekshof
Le cadran de l'Église Sainte Catherine d'Oppenheim (DE)

Ce cadran doit dater du XVème ou XVIème siècle, époque de renouveau de l’astrologie en Europe (on peut noter que le style est droit et non polaire). On peut voir sur la photographie ci-contre les 7 arcs de déclinaison habituels avec en plus en haut une huitième ligne permettant d'obtenir 7 rangées, une pour chaque jour de la semaine. On peut lire dans la colonne de gauche, le jour de la semaine représentée par sa planète (de haut en bas) : Soleil, Lune, Mercure, Mars, Jupiter, Vénus, Saturne.
Les heures planétaires sont numérotées en chiffres arabes 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9. Elles sont assimilées aux heures temporaires numérotées au dessous en chiffres romains …, VIII, IX, X, XI, XII, I, II, III.
Un jour de la semaine donnée, à une heure donnée, on lit le Régent de l'heure dans la rangée correspondant au jour et dans la colonne où se trouve l'ombre du style.

Oppenheim (DE) : Eglise Sainte-Catherine

Les heures planétaires

La question intéressante en gnomonique est de savoir comment diviser un jour en douze heures planétaires, selon la bonne doctrine. La plupart des cadrans solaires qui portent les symboles des planètes s'accommodent des heures temporaires, ce qui est une facilité regrettable, car il existe une différence considérable entre les deux systèmes comme on peut le constater sur le cadran suivant :

Prutz (AT) : sur une auberge
cadran avec heures planétaires Les signes des planètes sont placés dans le réseau des losanges formés par les lignes d’heures temporaires et les arcs de déclinaison. Ainsi, comme on ne dispose que de 6 étages de cases pour 7 jours de la semaine, les Régents du dimanche sont placés au-dessus de l’arc d’hiver

Paris 07 (75) : Hôtel des Invalides
Sur ce cadran, les heures temporaires sont appelées "planétaires"

La subdivision d'un jour clair en douze heures temporaires, appelées aussi heures antiques, bibliques, judaïques, inégales, consiste à considérer l'arc diurne du Soleil et à le diviser en douze portions, égales entre elles. Bien entendu, le lendemain du jour choisi, l'arc diurne du Soleil n'aura plus la même mesure et l'heure temporaire ne contiendra plus le même nombre de minutes mais chacune des douze heures temporaires vaudra exactement autant que chacune des onze autres. A une latitude donnée, les durées des heures temporaires ne dépendent que de la déclinaison du Soleil.
Ainsi, à nos latitudes moyennes, autour de 45°, l'heure temporaire de jour vaut 40 minutes vers le solstice d'hiver, 1 heure 20 minutes près du solstice d'été et, évidemment, 60 minutes les jours d'équinoxes. Il existe donc une variation du simple au double d'un solstice à l'autre. La même chose peut être dite, en inversant toutes choses, des heures temporaires de nuit ; chaque jour (date), la somme d'une temporaire de jour et d'une temporaire de nuit est toujours de 120 minutes.
Les calculs sont simples et, jusque vers nos latitudes, on tolère l'assimilation d'une ligne d'heure temporaire avec une ligne droite, tout comme on avait toléré l'identification d'une ligne d'heure planétaire avec une ligne d'heure temporaire. Mais cette seconde assimilation, bien plus grave, n'est pas acceptable.
La conception des véritables heures planétaires se révèle plus subtile. Il semble qu'elle était complètement sortie des esprits des gnomonistes jusqu'à ce que Joseph Drecker ne la remette en mémoire dans son ouvrage de 1925, "Die Theorie der Sonnenuhren" (2).
Puis un gnomoniste belge, Léon Thiran, a présenté un commentaire de Joseph Drecker dans un texte dactylographié, malheureusement demeuré non publié, mais assez connu des gnomonistes de langue française.


Les heures planétaires sont des durées, comme les heures temporaires; elles aussi sont des fractions du jour solaire et elles sont mesurées en temps solaire vrai. Chaque jour (date), il existe douze heures planétaires de jour et douze heures planétaires de nuit; sur un cadran solaire ces dernières ne peuvent figurer, mais il est possible de les tracer sur un tympan d'astrolabe où les positions d'étoiles renseignent sur les positions nocturnes du Soleil.


Fig 1a - Tympan astrolabe - hémisphère nord - latitude = 45°
graduation des heures planétaires du 21 décembre au 21 juin

Ce module de calculs permet de tracer les heures planétaires authentiques selon la méthode définie par J. Drecker, sur les tympans d'astrolabes nord ou sud.

On peut adjoindre au graphique, à la demande :
- le tracé des almucantarats de 10 à 80°
- le tracé des crépuscules
- le tracé des azimuts

On choisit la période :
- année
- du 21 juin au 21 décembre
- du 21 décembre au 21 juin


Fig 1b - Tympan astrolabe - hémisphère nord - latitude = 45°
tracé pour l'année
avec almucantarats, crépuscules, et azimuts

A l'instar des heures temporaires, douze heures planétaires sont limitées par treize lignes frontières (Fig 1a), dont la première est confondue avec l'horizon côté Est et la dernière avec l'horizon côté Ouest. Mais ces lignes ne sont pas numérotées de 1 à 13 ; en effet, tout comme pour les heures temporaires, chaque ligne indique que l'heure qui porte le même numéro vient de s'achever. La première ligne est donc, virtuellement, numérotée zéro ; elle pourrait, aussi bien, être numérotée 12 puisque son franchissement marque la fin de la douzième heure de nuit. Quant à la dernière heure, elle porte, logiquement, le chiffre 12, puisque son franchissement marque la fin de la douzième heure planétaire de jour et l'entrée dans la première heure planétaire de nuit.
Cette façon de numéroter 12 la frontière entre le jour et la nuit et de ne pas numéroter la frontière entre la nuit et le jour est traditionnelle: elle évite à la fois le zéro et la répétition du chiffre 12.
Les heures planétaires se réfèrent à l'écliptique et non à l'équateur céleste. Elles sont inégales entre elles, non seulement au fil des jours et des mois, mais encore pour une seule et même journée. Une heure planétaire correspond au temps qui s'écoule entre les levers de deux points de l'écliptique distants l'un de l'autre de 15 degrés. Soit un jour J, quelconque parmi les 365 jours d'une année dont on peut dire de chacun ce qu'on va dire du jour J. Ce jour-là, le Soleil se lève en un instant T. En même temps que le Soleil se lève, se lève aussi un certain degré de l'écliptique qu'on appelle l'ascendant, soit A. Cet instant est le début de l'heure planétaire n° 1, exprimé en temps solaire. L'écliptique continue à tourner (mouvement apparent) et arrive un autre instant où se lève un de ses degrés qui vaut : A+15°. La première heure planétaire est achevée et la deuxième planétaire vient de commencer. Ainsi de suite...



Figure 2a : hémisphère nord - latitude = 48° - tracé heure n° 6

Pour une meilleure lecture des heures planétaires, la discrimination des semestres se fait par couleur (voir figure 2a) :
- jour :
en vert : du 21/06 au 21/12
en bleu : du 21/12 au 21/06
- nuit :
en orange : du 21/06 au 21/12
en blanc : du 21/12 au 21/06


Fer J. de Vries, gnomoniste hollandais, avec son logiciel "ZONWLAK" (3), procure les éléments nécessaires au calcul et au tracé des heures planétaires, ainsi que des autres composantes d'un cadran astrologique.


Nicola Severino (4), a trouvé en 2008 dans la littérature ancienne, des images de cadrans ou de tympans d'astrolabe montrant des heures planétaires.
Fer J. de Vries en fait une présentation détaillée (5).

Image d'un cadran solaire horizontal
volume en latin de John Caramuel Lobkowitz (4c)
1644
Image d'un tympan d'astrolabe
une latitude proche de 48 ° Nord
ouvrage d'un auteur inconnu ~1508-1520
Image d'un tympan
tirée d'un volume de Oronce Fine
1553

Il n'est pas question de prôner l'astrologie, surtout sous son aspect prédictif et mercantile, mais cette division du jour, utilitaire et arbitraire comme toutes les divisions du jour, ne manque pas d'intérêt en ceci qu'elle considère le parcours "naturel" du Soleil le long de l'écliptique, alors que les autres systèmes se réfèrent à l'équateur ou même, simplement, à un arc journalier du Soleil. Pour un astrologue le "domicile "du Soleil est l'écliptique.


Bibliographie

(1) A propos des heures planétaires : I & II - Charles-Henri Eyraud, Paul Gagnaire - Cahiers Clairaut n° 105 printemps 2004 et n° 106 été 2004
(1a) A propos des heures planétaires- Charles-Henri Eyraud, Paul Gagnaire - Bulletin de l'ANCAHA - n° 97 été 2003

(2) L'ouvrage de Joseph Drecker fait partie d'un ensemble de textes gnomoniques rassemblés par Ernst von Bassermann-Jordan, sous le titre "Die Geschichte der Zeitmessung und der Uhren" édité à Berlin et Leipzig en 1925 chez "Vereinigung Wissenschaftlicher Verleger".

(3) Le logiciel "ZONWLAK" de Fer J. de Vries est téléchargeable sur internet

(4) Nicola Severino :
- 4a "LE ORE INEGUALI ECLITTICHE - LE FONTI"
- 4b "LE PRIME IMMAGINI DELLE ORE PLANETARIE SECONDO GIOVANNI DI SACROBOSCO"
- 4c "SOLIS ET ARTIS ADULTERIA : La bizzarra gnomonica di Johannes Caramuel Lobkowitz"

(5) Fer J. de Vries :
- "IMPORTANTI SCOPERTE DI NICOLA SEVERINO SULLE ORE PLANETARIE"